Au fond de moi, et depuis le début de mon voyage je souhaitais faire une retraite afin de mieux me connaître et répondre à mes questions internes. Je m’étais renseignée sur la retraite Vipassana qu’on m’avait déjà conseillée en France. J’avais également demandé à de nombreux voyageurs plus d’informations sur cette retraite. Chacun allait de son commentaire : « C’est génial, une vraie expérience, un révélateur… »
En me penchant un peu plus sur la question, je savais que j’allais devoir méditer, manger uniquement le matin et ne pas parler et cela pendant 10 jours. Cela me faisait peur mais je pensais que cela pouvait être un révélateur de mon « moi » interne.
Julie, une de mes amies, m’avait rejoint en Birmanie, elle était aussi attirée par ce genre de retraite d’autant plus qu’elle souhaitait arrêter la cigarette. Ha oui j’oubliais dans cette retraite, il faut se défaire de toute addiction et tout contact avec l’extérieur. Autrement dit vous donnez tous vos objets de valeurs.
Nous prévenons donc le centre de Yangoon, Chan Myae Yeiktha, de notre arrivée. Nous commencerons le 4 novembre. Par respect et pour connaître l’heure de début de notre retraite, nous passons la veille. A l’accueil des yogis, c’est le nom qui est donné aux personnes qui méditent, les nonnes prennent nos mesures pour nous faire nos vêtements. Pour vous donner une idée : vous avez une sorte de jupe de couleur marron appelée saari/longi, et une écharpe de la même couleur que vous devez mettre sur votre épaule gauche. Nous devions aussi porter des vêtements blanc qui couvrent les bras et les épaules. Nous serons prêtes demain pour débuter cette fameuse retraite Vipassana.
Le 4 novembre à 13h, nous nous présentons, nous recevons nos « habits de lumière » pour les prochains jours. Nous donnons tout ce que nous avons de valeur : passeport, carte bleue, téléphone, argent, ordinateur, tout, tout, même les livres, vous ne pouvez pas les garder. Heureusement j’avais gardé mon carnet de voyage, seul moyen de m’évader : écrire. Même si au début je n’avais pas cela en tête, vous verrez pourquoi j’ai changé d’avis. Puis, une des nonnes nous montre notre chambre, nous serons toutes les deux mais dans un confort minimum : quatre murs, deux matelas sur pailasse, une moustiquaire chacune et puis c’est tout ! Ca commence bien.
Jour 1 : Ayant pris nos marques dans les lieux, nous commençons par un cour intensif sur la méditation en vidéo. Plus d’une heure pour nous expliquer comment nous devons la pratiquer. Il en existe plusieurs types : assise, la plus connue de tous, et une méditation debout appelée “marche de méditation”. Nous recevons également notre planning journalier. Je vous laisse le consulter pour vous rendre compte de ce qui nous attendait.
C’est parti pour 5h de méditation dès le premier jour. Je me lance, sans vraiment savoir ce que je dois faire, j’observe autour de moi et fait le vide. En cinq heures de méditation quand vous n’êtes pas habitué, vous en avez des choses qui traversent votre esprit… Et la toute première fut : tiens ça ressemble à une prison. Nous méditions dans une salle, un endroit clos, avons des restrictions et ne pouvons pas sortir. C’est le premier jour, je me dis que j’ai peut-être un avis un peu dur sur la question. On verra comment cela se passe demain. Nous nous couchons, il est 21h30.
Jour 2 : Le réveil sonne à 4h, nous devons méditer pendant une heure avant de prendre notre petit-déjeuner. Essayons, essayons, mais la faim se fait ressentir car nous n’avons pas mangé depuis hier midi. Nous avons juste eu le droit à un jus de fruit à 16h la veille. Petite anecdote au passage, je me suis dirigée vers la maison d’un moine au lieu du réfectoire. imaginez nos fous rires avec Julie, nous apercevant de mon erreur.
Revenons à notre premier petit déjeuner. En silence, et de manière lente nous rejoignons le réfectoire les yeux rivés sur le sol. Comme il faut tout décomposer dans nos mouvements, le repas devient une répétition mentale de : prendre la cuillère, mettre de la nourriture dedans, lever la cuillère, avoir l’intention d’ouvrir la bouche, ouvrir la bouche, mâcher, mâcher, … et vous imaginez la suite. Au moins on est conscient des actions que nous réalisons. Après avoir remercié trois fois en s’agenouillant, Buddha, Dhamma (ses enseignements) et Sangha (ses moines) nous pouvons quitter les lieux.
Delà s’en suit une demi heure de ménage et de rangement de notre chambre ainsi que de l’espace commun. La suite, vous l’imaginez, retour à la méditation. Je me lance dans ma deuxième tentative de méditation. Une seule chose me vient à l’esprit : on est dans un hôpital psychiatrique. J’essaye de me concentrer à nouveau sur mes actes et j’arrive à me raisonner jusqu’au déjeuner à 10h30. Même processus que le matin, il faut tout noter, toutes les actions, aucune place à la communication et à l’échange auquel nous sommes tant habitués en France lors de nos repas.
Enfin, nous pouvons nous reposer et dormir un peu afin de reprendre des forces pour l’après midi et écouter notre second cours de méditation. A 14h15, avec un peu de retard, nous débutons la séance mais somme studieuses. Puis l’habituel jus de fruit pour palier nos fringales.
Cette après-midi est assez difficile et en même temps beaucoup plus calme pour moi que le matin. Julie, peine un peu car elle a décidé d’arrêter la cigarette mais se calme rapidement après quelques heures de méditation. C’est effectivement une très bonne action pour calmer nos craintes, nos peurs et nos pics d’énervement. Puis 21h30 arrive, nous sommes éreintées par cette journée et nous endormons rapidement.
Jour 3 : Même rituel, même démarche, même temps de méditation, on a l’impression d’être des robots. Ce matin, nous faisons le point avec notre guide. Il nous oriente sur des démarches à faire pour mieux méditer, de manière très robotique et sans compassion. Pour que vous compreniez pourquoi il agit de la sorte il faut que je vous en dise plus sur la méditation Vipassana. Le principe de base est : se détacher de tout que ce soit du matériel ou bien de ses proches par exemple pour se libérer de la souffrance. Ce n’est qu’après avoir demandé d’avoir l’autorisation de lire un livre sur Vipassana que je le comprends un peu plus. Vu d’extérieur, vous vous rendez compte, nous devons demander l’autorisation pour avoir le droit de lire un livre, même sur la méditation que nous sommes entrain de faire. On croit rêver, non ? Le pire de tout, je crois, c’est quand nous avons demandé l’autorisation de méditer dehors au lieu de notre pièce fermée. C’est comme si vous demandiez à quelqu’un : « J’ai le droit de vivre ? ». Sur le moment, j’accepte cela mais cela me paraît tout de même irréaliste.
Ces événements me poussent à écrire mon journal de bord : pour garder un peu d’humanité et de pensées. C’est ma manière à moi de m’échapper de cet endroit où la liberté est brimée. L’énervement revient souvent aux alentours de 16h car nous avons beaucoup de temps morts même si nous devons méditer plus de 10h par jour. Très dur pour des novices en méditation.
Lors de mes méditations de l’après midi et du soir, je me rends compte que pour pratiquer ce genre de méditation, il faut avoir un problème à régler dans sa vie. De même, cela correspond plutôt à des personnes ayant des vies arasantes, où elles sont sans cesse sollicitées. Je fais une introspection sur mon besoin en méditation, et ouvre les yeux sur mon cas. Je n’en ai pas vraiment besoin car ma méditation je l’ai entreprise par le sport depuis 3 ans. En courant 3 fois par semaine, je vous assure que vous avez le temps de résoudre des problèmes… Du coup, je réfléchi à des projets que je pourrais réaliser à la fin de mon tour du monde, des idées fusent dans tous les sens. Il faut que j’avance sur ça. Il est de nouveau 21h30, je suis fatiguée. Une troisième nuit, demain nous continuerons le même rituel.
Jour 4 : Levées un peu plus tard pour cause de réveil mal réglé, nous allons petit-déjeuner, penser à ce que nous mangeons, puis méditer encore et encore. Avant le petit déjeuner, je m’octroie le droit de méditer dehors, et là un événement va nourrir ma volonté de partir. Je marche en méditant et un enfant essaye de jouer avec moi. Je me retrouve bloquée dans cette méditation, impossible de jouer avec lui alors que lui passe et repasse à côté de moi. C’est comme si je perdais mon libre arbitre de choisir de jouer avec lui… Sentiment de frustration ultime !
Le déjeuner arrive et nous mangeons en silence, conscient de ce que nous ingurgitons à nouveau et nous rendons dans notre chambre. Un peu d’écriture à nouveau pour m’évader et un peu de lecture pour comprendre Vipassana. Je me document toujours ce que je fais afin de comprendre et ne pas rester dans un flou. Et l, une nouvelle fois cela me saute aux yeux, nous sommes dans une aliénation totale de nous-mê me et la femme n’est pas respectée. Moi qui souhaite la mettre en avant dans l’ensemble de mes vidéos, je me retrouve dans un endroit à l’opposé. Je m’énerve intérieurement. J’essaye de prendre du recul et me dis peut être que mon esprit me joue de tour. Je vais méditer pour y voir plus clair. Au bout de cinq minutes, j’y vois très clair, je dois partir, nous partirons, c’est viscérale, je ne peux plus me mentir à moi-même et rester dans cet endroit !
Sac à dos faits, habits de ville vêtus, nous nous dirigeons vers la sortie. C’est là que nous croisons une vieille dame que nous avons vu pendant les 3 derniers jours. Elle nous interroge sur notre départ si précipité, je lui indique que ce type de retraite ne nous correspond pas. Elle le comprend facilement. Je m’interesse à elle également et sur la période de sa retraite. Elle est là depuis 11 ans et va rester jusqu’à sa mort. J’ai envie de lui crier : « Sortez, allez respirer l’air de dehors, marchez, découvrez, mais ne soyez pas résignée ! » Je le garde bien entendu pour moi car chacun à ses propres raisons de la faire. Cela conforte encore plus mon idée de quitter ce lieu.
Nous informons l’accueil de notre départ mais devons tout de même demander l’autorisation de sortie à notre guide. Il accepte bien entendu mais ça en est trop, je me sens oppressée. Nous remercions tout le monde, prenons nos sacs et nous dirigeons vers la porte que nous guettions depuis trois jours. De l’air, de la vie, du bruit ! La liberté !
En conclusion, je ne veux pas démolir la retraite Vipassana mais sachez que c’est vraiment une expérience difficile et je pense à mon sens que vous avez plein d’autres méthodes pour vous remettre en cause, avancer et solutionner vos problèmes.
– Premier conseil : bougez, activez vous, faites du sport si vous le pouvez, votre esprit sera plus vif.
– Deuxième conseil : manger mieux, varié, équilibré mais ne vous restreignez pas, faites vous plaisir avec modération. C’est bien connu que 3 burgers par jour ne sont pas conseillés.
– Troisième conseil : Vivez, ouvrez les yeux, faites votre propre expérience et surtout écoutez vous !
1 Comment
Mai rd, 2018 5:29 Reply
Avec tout mon respect, vous êtes complètement passé à côté de votre retraite et n’avais pas compris la finalité de son enseignement… dommage.